Une panne de métro, des embouteillages, un événement contrariant… les sources de stress sont partout et quotidiennes. Et c’est l’intestin qui en pâtit. Mais stress et syndrome de l’intestin irritable sont-ils liés ? C’est ce que nous allons vérifier.
L’intestin, ce deuxième cerveau
Le lien de cause à effet entre le stress et les troubles intestinaux a longtemps été pris à la légère. Mais aujourd’hui, il est avéré que les situations de stress ont un effet sur les troubles organiques et fonctionnels, notamment sur le système digestif. Or, notre cerveau et notre intestin échangent constamment des informations, via l’axe intestin-cerveau dont le nerf vague. Le nerf vague subit constamment nos émotions et l’intestin est informé en cas de situation de stress. Et c’est l’intestin qui en fait les frais, où se déclenchent alors crampes d’estomac, douleurs abdominales ou encore accélération du transit.
Le système hormonal est lui aussi soumis aux variations du stress. Le cortisol et la CRF (Corticotropin Releasing Factor) sont davantage sécrétés en situation de stress. Lors d’un événement stressant, l’hippocampe va évaluer la situation et envoyer un message à l’hypothalamus qui va sécréter de la CRF. Et la CRF, principal neuromédiateur du stress, a un impact sur les troubles intestinaux. L’équipe du Pr Bruno Bonaz (CHU de Grenoble) en a apporté la preuve grâce à l’injection dans le cerveau de rongeurs de CRF. L’équipe a constaté qu’après injection de CRF, les rongeurs souffraient de diarrhées et les contractions du côlon étaient augmentées. Ces contractions accrues du côlon chez l’homme, donc en partie liées au stress, favoriseraient ainsi les douleurs abdominales.
Le stress a en outre pour conséquence d’altérer la motilité intestinale (la capacité qu’a l’organisme à déplacer les aliments) et la sécrétion des fluides. La suite, vous la connaissez : ballonnements, douleurs abdominales et passages (bien) plus fréquents à la selle. En outre, la perméabilité intestinale est elle aussi mise à mal lors d’intenses périodes de stress.
Stress et syndrome de l'intestin irritable étroitement liés
Si les mécanismes sont encore à ce jour peu compris, la perméabilité intestinale semble étroitement associée au syndrome de l’intestin irritable. Or, nous l’avons vu, le stress tend à altérer la perméabilité intestinale, cette dernière ne pouvant plus limiter le passage des composantes de la paroi bactérienne. La muqueuse intestinale va alors activer ses cellules immunitaires, générant ainsi une inflammation et des douleurs.
Il a également été constaté que chez les malades SII la régulation du principal neuromédiateur du stress, la CRF, ainsi que le taux de cortisol plasmatique (hormone sécrétée notamment en situation de stress) dysfonctionnent. Les raisons de ce dysfonctionnement propres au SII sont encore à l’étude. Mais la dérégulation de la CRF et un taux de cortisol plasmatique trop élevé vont provoquer une hyperactivation du système sympathique et une inhibition du système parasympathique (tous deux forment le système nerveux autonome), donc du nerf vague, d’où une sensation de stress permanent. Et c’est sans fin : l’intestin est informé de cette situation, réagissant en conséquence. Altération de la motilité intestinale favorisant les douleurs, augmentation des diarrhées en réponse à un taux de CRF trop élevé…
Intestin irritable, d’un naturel plus stressé ?
Et inversement, les personnes souffrant du syndrome de l’intestin irritable seraient d’un naturel plus stressé et anxieux. Une étude menée en Chine a souhaité mesurer le rythme cardiaque en repos et dans des situations de stress chez des femmes atteintes de SII et d’autres en bonne santé. Les résultats furent sans appel : les malades SII avaient des scores d’anxiété plus élevés que les personnes dites saines et une variabilité cardiaque plus conséquente. Une seconde étude, menée sur près de 600 personnes, a analysé l’apparition du SII après une gastro-entérite liée à la bactérie Campylobacter – la gastro-entérite faisant partie des origines récurrentes du SII. L’équipe du Pr Spence a alors pu constater que les patients ayant des niveaux de stress et d’anxiété plus élevés avaient davantage de risque de développer le SII.
Remémorez-vous enfin vos derniers maux de ventre ou vos derniers passages incontrôlés sur le trône. Ont-ils fait leur apparition simultanément ou presque ? Ce n’est pas impossible…
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Sources :
- Société savante des maladies et cancers de l'appareil digestif digestif
- Société canadienne de recherche intestinale
- « Les pouvoirs du nerf vague », Sciences et Avenir, mai 2018, n° 855, p 30-40
- Spence MJ, Moss-Morris R., "The cognitive behavioural model of irritable bowel syndrome : a prospective investigation of patients with gastroenteritis", Gut, 2007;56:1066-1071
- Wan H, Chen Y., "Effects of antidepressive treatment of Saint John's wort extract related to autonomic nervous function in women with irritable bowel syndrome", Int J Psychiatry Med, 2010;40(1):45-56
- Le Figaro Santé
- Allodocteurs